Les médias en parlent encore très peu. Pourtant, une révolution est réellement en cours ! Et va changer beaucoup de choses.
Je veux parler des objets « imprimés » en 3D. Le mois dernier, je lisais le billet « L’imprimante 3D personnelle, une révolution plus grande qu’internet » évoquant notamment Chris Anderson dont je partage totalement la vision d’avenir.
Voici une anecdote, qui fait beaucoup rire un ami ergo-concepteur :
il y a quelques années, comme tout accro à son écran d’ordi, j’avais une fois de plus oublié la cuisson que j’avais mise en route. Heureusement, je suis revenue dans ma cuisine juste à temps pour retirer le couteau de ma casserole, couteau dont le manche commençait à fondre… Une fois refroidi, le manche noir arborait une nouvelle forme, sorte de protubérance plate, située plutôt dans le haut du manche…
Les photos de mon œuvre (on ne rit pas, hein) :
Quand j’ai repris en main ce couteau pour le nettoyer et le ranger, j’étais à la fois surprise et emplie d’un bien-être ergonomique : il se trouve que ce « creuset » inattendu permettait à mon pouce de trouver sa place et de s’y caler merveilleusement comme sur un appui. Quel bonheur de se servir dorénavant de ce couteau pour mes courts moments culinaires.
J’ai bien essayé de trouver le même genre dans le commerce « sur le marché » comme on dit – expression qui deviendra peut-être obsolète un jour – mais rien, pas de manche exactement comme ça, adapté et parfaitement sur mesure par rapport à la taille de mon pouce. Merci au hasard magique !
Vous voyez où je veux en venir… Si j’avais eu une imprimante 3D personnelle, je l’aurais reproduit tout de suite (en l’améliorant et en le débarrassant de ses petites imperfections) !
Je vais donc voir du côté des FabLab de ma région et vous tiendrai au courant, car j’ai notamment une autre idée en tête, un petit truc qui me serait bien utile, toujours dans le domaine culinaire…
Le sur mesure et l’unité changent aussi bien le quotidien que la donne économique
Bien sûr, les productions en série ne vont pas s’arrêter. Mais énormément de choses risquent de changer avec l’impression tridimensionnelle. Et tous les secteurs sont concernés.
- Le confort : selon moi, le meilleur impact réside dans le secteur de la santé. La création de formes imprimées en 3D permet du sur mesure. Ainsi pour chaque personne – je pense particulièrement aux personnes handicapées –, des solutions sont envisageables au niveau du confort, voire de la rééducation. Le champ est ouvert et très vaste dans ce domaine. Quel changement de vie en perspective !
Exemple d’un « plâtre » utilisé pour un bras cassé mais aussi pour toutes sortes de fractures. Voir le process. On parle même d’organes de substitution ! Imaginez l’avancée en matière de chirurgie !
- Sans parler de production de plats alimentaires… Récemment, on a vu passer bien sûr hamburgers et pizzas (punk food de geek en général), mais franchement, il y a des limites. Avec évidemment un gros doute sur la qualité finale… : exemples de chaise en sucre et de bonbons au chocolat.
- Le gaspillage : les productions « sur mesure » et à « l’unité » permettent de faire des économies drastiques en termes de matériau et de quantité (donc de déchets). L’industrialisation est complètement à revoir car certains pans sont ou vont être totalement dépassés.
- Les métiers : cela va également faire évoluer les professions. Les designers 3D ont une autoroute devant eux, tout comme les ergonomes et les éco-concepteurs.
Mais aussi ceux qui prendront le virage des matériaux écologiques biodégradables, recyclables, sans danger pour la santé, et (cerise sur le gâteau) solides, pour servir de base à la création d’objets imprimés en 3D. Et bien sûr les formateurs en CAO, les créateurs de logiciels.
Les architectes également, qui l’utilisent déjà pour sortir des maquettes. Et apparemment, on peut déjà construire sa maison, du moins les fondations, alors plus de raison de laisser les sans-abris dehors en argumentant une question de coût. Ensuite, plus qu’à connecter votre maison. Et hop, bienvenue dans le XXIe siècle. (Désolée pour l’énorme raccourci). Quant aux inventeurs, plus besoin de se mettre à genoux devant son banquier pour trouver les moyens de développer son prototype. Le process devient rapide et beaucoup moins cher, sans parler que c’est presque un jeu d’enfant. Plus besoin de mettre différents fournisseurs sur le coup. Vive l’extrudation !
- Le quotidien : en termes de produits ménagers, on n’aura plus à attendre des semaines pour commander une pièce manquante ou à sortir son mouchoir en apprenant qu’elle ne se fait plus. Le résultat est qu’on n’aura (heureusement) plus l’obligation de jeter son produit, puisque réparable… L’obsolescence programmée n’aura plus lieu d’être. Évidemment, certains artisans devront peut-être changer de métier si tout le monde finit par faire soi-même. Le pouvoir revient au consommateur qui devient un maker.
J’écris au futur, mais en fait, tout ceci se passe déjà aujourd’hui.
- De même, pour le bricolage : pourquoi courir dans un magasin (surtout si son mode de transport pollue), pour acheter un sac de 100 clous à vis ? La différence ? : on commande à distance le fichier qui vous permet de l’imprimer… Plus besoin de livraison (impact écologique par une économie de transport de l’objet). L’avenir est aux logiciels de design (outil OpenScad) et aux codeurs (toujours eux) qui prépareront les fichiers qui vous seront ensuite vendus pour les éléments courants… Sauf à tout faire soi-même bien sûr.
Question subsidiaire : pour les pièces de monnaies, la 3D ça marche aussi ? Vous me direz, avec les Bitcoins, plus besoin d’objet réel. Un jour prochain, on n’aura même plus de monnaie en papier.
Cette liste est évidemment très exhaustive. Si ce n’est pas encore tout à fait perceptible par le grand public, l’impression 3D telle qu’elle est développée et projetée va considérablement bousculer les notions de partage, de droits d’auteur, de commerce classique, ainsi que notre environnement. Ces changements de mode de vie en profondeur qui se profilent remettront forcément un jour ou l’autre en cause également la notion de travail et de revenus… La nature des activités évoluant parallèlement.
Mais dans tout cela, une chose reste primordiale, et je n’en démordrai pas : celle de nettoyer et de respecter la planète, notre unique habitat.
Pour info : les modèles actuels d’imprimantes tridimensionnelles (attention Marketbot et Replicator sont des marques déposées) sont de tous ordres et les prix varient également. Mais dans l’ensemble, je trouve que c’est plutôt abordable compte tenu de la récente innovation.
Ensuite, achat de bobines et achat des logiciels. À ce sujet, on apprend que Photoshop (Adobe) vient de se lier à MarketBot pour proposer un outil qui retouche et optimise les fichiers pour impression 3D.
Quid de la nature des matériaux ?
Venons-en maintenant à notre préoccupation : l’aspect environnemental…
Les matériaux utilisés actuellement sont multiples. On connaît le plastibot, sous forme de bobines de « fil » appelé filament plastique. Il est fabriqué à partir des déchets en plastique recyclés. Et déjà les couleurs primaires, voire secondaires, sont sur le marché.
Les différents types de filaments en plastique pour imprimantes 3D.
Je pose simplement la question : si c’est très bien de recycler ainsi le plastique, la nature même de l’objet produit est-elle vraiment écologique, comme annoncé ? L’expérimentation est en cours et l’évolution fait que les « plastiques » végétaux prendront le dessus. Du moins espérons-le. Qu’ils soient alors biodégradés, car oubliés dans un coin, ou bien recyclés, cela restera sans danger pour la planète.
Parce que quitte à créer et à sculpter toutes sortes d’objets et de formes, une fois en main, je préférerais avoir affaire à quelque chose de naturel…
Ensuite, vient la question des couleurs : comment ces matériaux filaires que l’on vous vend sous forme de bobines, sont-ils colorés ? Là aussi, quid de l’innocuité des bains au moment de la transformation…
Et puis, quand une personne en aura marre de son objet sculpté en 3D, aura-t-elle à sa disposition une poubelle spéciale « matériaux à recycler pour 3D » ? Ou bien continuera-t-elle de les jeter dans le tout-venant ? (Lire mon billet sur le tri de nos déchets.)
La question du traitement de nos déchets n’est pas résolue pour autant… Car même si l’on change les procédés de fabrication en les simplifiant, jusqu’à « imprimer » des vêtements (!), beaucoup de composants restent nocifs…
Quelle législation ?
Si les médias en parlent si peu, peut-être est-ce parce qu’il existe un consensus sur le fait d’attendre, dans le but de retarder l’expansion de ces procédés, afin de donner le temps aux États de légiférer ?
Car, comme on le sait, ces derniers sont toujours en retard face à la vitesse de l’innovation. Or, ici, certaines règles doivent être établies quant à l’aspect juridique.
En effet, si une imprimante 3D permet à tout un chacun de créer des tas d’objets sur mesure, le revers de la médaille – car il y a malheureusement toujours des esprits retords sur cette planète –, est que des objets nuisibles, ou bien détournés, peuvent être également sculptés par un particulier… Ainsi, le cas d’armes à feu a été mis en avant récemment.
Il y a donc urgence de penser à tout ! Mais cette partie n’est pas facile à traiter, les logiciels permettant de tout reproduire.
Outre les esprits dangereux, il y a également le fait qu’un particulier peut créer ses propres jouets et éléments de jeux, ses propres rêves j’allais dire. Prenons le cas des cubes de construction : que peut faire alors la marque Lego par exemple face à des millions de futures « contrefaçons » ? Ce mot voudra-t-il encore dire quelque chose ? Le droit est remis également en question. Vaste programme. Pourtant, il faut faire vite. Certes, on avance question récompenses. Mais quand nos gouvernants auront vraiment compris l’enjeu, peut-être accéléreront-ils le mouvement et multiplieront-ils les investissements ? (On peut rêver.)
En attendant, les communautés – notamment celles des Laboratoires de fabrication (LabFabs), commencent à s’éclater, et je voudrais souligner le clin d’œil sympa de cet « événementiel » d’un jour, à savoir la Galette des Rois fêtée avec une fève #frenchtech… réalisée en 3D bien sûr ! Plus d’info.
La ruée vers le 3D
Début 2013, ce billet au sujet du filament plastique le plus répandu, élément principal d’une imprimante 3D – qui s’appelle un consommable, tout comme les cartouches d’encre –, commence ainsi « L’impression 3D, c’est le truc en vogue depuis plusieurs mois… » : eh bien non, d’abord, cela existe depuis pas mal d’années, et deuxièmement, c’est tout sauf une mode. C’est juste une révolution qui est en train d’exploser, de manière presque invisible, mais bien réelle. Il faut s’y préparer.
Là où je suis d’accord avec l’auteur du billet, c’est à propos dudit plastique : quid en effet de l’impact de matériaux fondus et accouchant, couche après couche, à la forme souhaitée ? Peut-être pourrions-nous créer des consommables (je parle de ces bobines de fils donc) qui soient tout sauf l’éternel plastique dont on a du mal à se débarrasser, tel le Capitaine Haddock dans « Vol 714 pour Sydney » avec son sparadrap ! Oui, l’ère va changer, mais n’oublions pas la planète !
Ne peut-on créer un composant, fibre, fil, matière, comme vous voulez (outre l’acier qui est aussi utilisé en 3D), réellement écologique ? Par exemple végétal, à base de champignons ou encore développer l’impression 3D à base d’algues ? Je dis ça, je ne dis rien…
Les agences qui se positionnent actuellement sur des services d’impression 3D, de même que les fournisseurs de filaments plastiques qui se ruent sur le marché devraient réfléchir à deux fois s’ils ne veulent pas être pointés du doigt, en matière d’environnement.
En tout cas, une chose est presque sûre : Jules Verne aurait adoré cette machine et l’aventure qui nous attend ! Alors let’s go.
Retour de ping : Une innovation écologique au service de l'impression 3D